Avoir la chance de devenir un Coordinateur- mais pas n’importe lequel, un champion dans ce domaine… c’est un rêve qui n’est pas à la portée de tous. Et pourtant, Fudo l’avait finalement atteint.

L’homme aux cheveux blancs et à la peau sombre avait son regard impassible dirigé sur un ruban- un ruban qui rappelle la Robustesse, la catégorie qu’il représentait dorénavant. Un poste important, car dorénavant, il faisait partie de ceux qui seraient le visage de la Coordination à Strana. Une nouvelle discipline qui doit encore faire ses preuves chez ceux qui ignoraient son existence, ou qui n’en sont pas convaincus.

Mais Fudo n’a pas peur. Bien d’autres épreuves avaient été traversées ; celle-ci en était une de plus, une grande, mais une qu’il pourrait traverser.

Il était la robustesse. Rien ne l’avait fait plier jusqu’alors, et il ne plierait pas là-aussi.

Après tout, qui aurait cru dès le départ que quelqu’un comme lui aurait pu être dans une telle position maintenant ? Un gamin qui faisait partie de ces fameuses tribux de natifs qu’on ne veut pas voir à Strana, qu’on veut éloigner le plus possible parce qu’ils sont différents, qu’ils vivent dans leur coin et ne suivent pas les règles de société qu’il y a, autour d’eux ? Surtout la sienne, qui a toujours réussi à vivre dans cette Toundra Bolshoï et à y survivre, sans avoir besoin de l’aide ou d’aller aux contacts des Stranaïtes ?

Évidemment que personne n’y aurait cru. Même lui n’y aurait pas cru au départ, si on le lui avait raconté. Son peuple était de l’un des plus isolés de la région- un qui ne faisait pas confiance à l’extérieur, aux autres, qui préférait rester et vivre dans les lieux les plus dangereux que la Nature pouvait offrir pour apprendre à survivre le plus tôt possible, à être débrouillard et indépendant pour leur survie… Une tribu qui “rejette” l’extérieur autant que possible pour s’assurer sa propre tranquillité.

C’est en tout cas ainsi que les choses étaient, lorsque Fudo était né sur ces terres de glace. Le “monde extérieur” qu’ils pouvaient parcourir était limité, et aller plus loin pourrait entraîner leur disparition, c’était ce que l’on disait autant aux enfants qu’aux adultes. Que des créatures “similaires” à eux et à la fois si différentes y rôdaient autour, plus loin, et qu’ils ne les aimaient pas. Bien des choses qui font peur, pour assurer la survie des gens et de ceux qui n’auraient pas les idées en place.

Mais Fudo ? Fudo était un drôle de gaillard. Aussi tôt qu’il se souvienne, les “créatures” qu’on décrivait presque comme des monstres, bien pire que les Pokémon qui pouvaient pourtant se révéler dangereux autour… Même d’eux, il était curieux. Et rien que l’on lui dise ou explique ne changeait cela. Quand il le pouvait, il disparaissait tôt le matin pour aller jouer aux aventuriers et s’approcher des frontières de son monde pour observer l’extérieur, ces autres “peuples” comme s’ils étaient des Pokémon à ne jamais approcher mais juste à regarder de loin- et aussitôt qu’on se rendait compte de sa présence, il disparaissait et retournait toujours à son village, sans problèmes.

Une curiosité qui lui avait valu bien des soucis et des remarques sévères de la part d’anciens et de ses parents, mais rien qui ne pouvait dissuader Fudo, curieux comme il est. Les Pokémon, les humains- dangereux ou non, il allait quand même les observer avec curiosité, parfois en s’amusant à jeter des objets ou des baies qu’il trouvait pour étudier leur comportement, leurs réactions… et en lui, il portait l’espoir de pouvoir un jour approcher de plus près tout cela. D’enfin satisfaire sa curiosité.

- Vous êtes bientôt prêt ? Le discours de notre Tsarine commencera sous peu.

Une voix soudaine sort Fudo de ses pensées- pas de quoi le surprendre complètement, mais assez pour que son regard se tourne vers la personne responsable, une personne du staff qui semblait annoncer qu’il était bientôt l’heure pour lui d’aller sur scène. Le regard de marbre du champion la fixe un instant, avant d’hocher de la tête comme réponse.

La Tsarine… Dire qu’elle est responsable de sa présence ici.

Après tout, c’est elle qui, en arrivant au pouvoir il y a 10 ans, à précipité Fudo dans son sort. Son fameux “cadeau” empoisonné aux peuples natifs, l’île Kury- comme si ce morceau de terrain pouvait accueillir tranquillement tous les peuples et leur histoire, dans le moindre problème. Bien évidemment que c’était pour les pousser une bonne fois pour toutes hors du continent, et bien des habitants de son peuple étaient contre l’idée de quitter la toundra qui les avait à la fois protégés et entraînés à survivre.

Enfin, lorsque l’on est menacé rapidement si l’on refuse ce “beau cadeau”... la survie prévaut. A contrecœur, avec ceux qui voulaient tenir, Fudo dût bien rapidement accepter ce changement de terrain et quitter cette terre qu’il aimait pour se retrouver “exilé” avec ses pairs dans un nouveau monde qui n’était pas le leur. Oh, le mal du pays n’avait jamais été aussi fort- mais que pouvaient-ils faire ? Rien. Tout simplement. Ils n’avaient pas ce qu’il faut pour faire face à quelque chose d’aussi grand que Strana.

Mais abandonner ? Non, cela ne fait pas partie du vocabulaire de Fudo. Il n’avait jamais abandonné ses idées et autres bêtises à l’époque où il jouait les aventuriers curieux, quoi qu’on lui dise- et ce n’est certainement pas une étrangère qui ne connaît rien à leur histoire et traditions qui allait changer les choses ! Cela ne faisait que renforcer une nouvelle idée que lui et d’autres portaient en eux : s’entraîner, se renforcer, et devenir assez forts et importants pour récupérer ce qui était leurs.

Des années d'entraînements sans relâche. Des années et des années à s’adapter dans ce nouveau “monde” à partager avec d’autres peuples et Pokémon qu’ils essaient de ne pas déranger, gardant leur envie de rester isolés- des épreuves physiques et mentales à supporter, qu’il doit traverser parfois seul, parfois avec sa famille et son peuple- mais jamais Fudo ne lâchait. Il devait le faire, pour son peuple- pour réaliser son but le plus précieux.

Chaque cicatrice gagnée, chaque nouvelle blessure accumulée, chaque larme tombée sous la douleur, c’est une marque de sa résistance gagnée au fur et à mesure- de sa ténacité, de son refus d’abandonner. Bien des gens n’aimaient pas garder des séquelles d’événements traumatisants, mais Fudo ? Il les porte avec fierté. Elles lui permettent de se souvenir de ce qu’il a traversé, de voir pourquoi il s’est toujours battu.

Alors qu’il y pense, il se rend compte que son regard était fixé sur ses mains, sur lesquelles quelques de ces fameuses cicatrices pouvaient être vues et qu’il allait cacher avec l’aide de gants qu’on lui avait donnés, dans cette tenue de coordination élégante et fabriquée pour cette grande occasion.

Un instant, Fudo hésite. Mais cette hésitation est bien courte- et ces gants se voient être rangés dans un coin sans même avoir eu la chance d’être portés.

Ce n’est pas parce qu’aujourd’hui était un grand chose que des habitudes devaient changer. Même lorsqu’il avait entendu parler de la coordination pour la première fois, qu’il en était curieux… il n’avait pas changé pour autant.

Même si son peuple était bien isolé, ils avaient avec eux quelques “restes” du monde “civilisé” qu’ils gardaient et utilisaient pour espionner l’extérieur qui avait volé leurs terres dans l’espoir que quelque chose change… c’est grâce à un vieux poste de radio que Fudo avait entendu parler de la coordination pour la première fois. De quelqu’un d’une région extérieure qui en avait fait dans sa région natale, et qui voulait faire découvrir cette étrange activité aux yeux des habitants de Strana.

Jamais la curiosité de Fudo n’est revenue aussi vite, la même qui l’avait animée dans sa curiosité du monde extérieur, qui l’avait encouragé à devenir plus fort pour mieux tenir dans le monde autour- il s’était retrouvé en un instant à vouloir en apprendre plus. A s’y renseigner le plus possible. Des personnes parfois aussi respectées que des champions dans leur région, des stars que l’on apprécie et qui ont leurs fans… des gens qui sont vus et entendus.

Des gens que l’on remarque et que l’on écoute.

C’est de ça que son peuple à besoin pour espérer être “remarqué” et peut-être montrer au monde ce qui se passait sur l'île Kury, ce qu’on avait fait à sa famille, à son peuple.

Il s’était à préparé comme s’il allait simplement sortir et survivre dans les alentours- mais cette fois, Fudo n’allait pas pouvoir revenir de suite. Non, il expliqua son étrange plan à ses frères et sœurs, qui étaient aussi curieux que confus sur cette idée soudaine de sa part. Certains n’étaient pas convaincus ou trouvaient cela idiot, mais d’autres partageaient son enthousiasme sur cette idée, et que toute tentative était bonne à prendre. Quoi qu’ils pensaient, la décision de Fudo était prise, et l’homme quitta finalement son peuple pour devenir un natif qui devra à présent s’adapter au monde qu’on avait tenté de le protéger et de l’éloigner de…
Survivre dans la nature était quelque chose- mais dans le peuple “civilisé” de Strana ? C’était bien plus difficile. Tous ces yeux sur lui, cette curiosité ou ce dégoût qu’on avait parfois pour sa simple existence… C'était à son tour d’être observé, et d’être jugé de près ou de loin : mais cela n’allait pas l’arrêter. Il avait vécu pire, et il devrait s’habituer à être sous le feu des projecteurs quoi qu’il arrive.

Ses premiers concours n’étaient pas simples. Trouver une bonne catégorie, savoir comment trouver la façon de se comporter pour être à la fois vu et apprécier... ce n'était pas simple, et au début, Fudo dût beaucoup observer et accumuler quelques défaites dans les rares concours qui se déroulaient dans la région pour mieux comprendre ce qu’il fallait faire. Une période dans laquelle il apprenait aussi à se mêler un peu plus au monde qui l’entoure, mais toujours en gardant sa véritable “identité”, son respect pour son peuple et sa tribu quoi qu’il arrive. Que l’on le regarde mal ou qu’on voit d’un mauvais œil son passé, Fudo refuse de se laisser abattre. A la place, il laisse ses talents de coordination qu’il continue de forger sans relâche parler pour lui, montrer sa force et sa résistance et prouver qu’il est prêt à tout sans hésiter pour avancer.

Peu à peu, ses défaites deviennent des victoires, son prénom commence à être murmuré entre les connaisseurs en coordination, son visage était reconnu par moments- et les regards mauvais et curieux qu’il recevaient devenaient parfois des visages d’admiration, des expression qui lui réchauffent le coeur et le motivent à continuer encore et encore. De la motivation pour atteindre son but.

Et aujourd’hui…

- Monsieur Karepia, c’est l’heure- il faut y aller.

La voix de la personne de tout à l’heure était revenue- après tout ce temps, ces années d’entraînement et d’adaptation… Fudo allait se présenter à tout Strana, en compagnie d’autres personnes au rôle similaire, en tant que Champion de Coordination.

C’était l’heure de prendre le rôle avec fierté et importance- c’était à présent le moment qu’il attendait pour devenir important et porter avec lui la voix de son peuple. De montrer que rien ne l'arrêtera, autant dans ce nouveau rôle que dans son objectif. Même si ce chemin n’était pas simple à prendre, qu’il avait beaucoup à faire encore… il n’arrêterait pas.

Il rendra son peuple fier, Fudo en fait la promesse.

L’homme se regarde une dernière fois dans le miroir, observant que son costume d’acier, rappelant à la fois ces chevaliers avec une pointe de ce qui fait son identité et aux couleurs de la tsarine soit bien présentable- et sans plus attendre…

Le voilà parti pour retourner sous les feux des projecteurs.