J’suis désolé

Cela faisait peu de temps qu’Artyom avait quitté enfin l’infirmerie, après avoir pu récupérer un maximum de ses blessures. Bon, son bras avait encore le droit à une attelle pour encore un peu de temps et s avoix avait encore du mal à sortir sans avoir l'air rouillée par moments, mais mieux vaut faire le plus attention et s’assurer que cela récupère le plus vite possible. Le militaire avait dû se rendre à l’évidence qu’il ne pourrait pas faire de véritable mission dans un tel état- il serait plus un poids mort pour ses camarades et inutile en tant que tel.

Autant dire que le militaire avait eu du mal à se sentir bien ces derniers temps- enfin, entre ce qui lui était arrivé, son nouveau don, et ce qui s’est passé entre lui et Ilya… ce n’est pas comme s’il était à un problème près, non ? Au moins, son “temps de repos” lui a permis d’apprendre à de mieux en mieux faire taire un maximum son foutu don qu’il continuait d’haïr et qui le faisait régulièrement souffrir s’il n’y faisait pas assez attention- il arrivait enfin à avoir des périodes de temps ou il pouvait ne plus entendre ceux qui l’entouraient s’il se concentrait assez. Petit à petit, il peut enfin reprendre sa vie “normale” sans souffrir de migraines à répétition, que les infirmiers galérait à soulager par moment.

Enfin, normale… pas vraiment, vu qu’il reste des blessures et de la fatigue à gérer. Du coup, Artyom était surtout à concentrer son temps à essayer soit d’aider comme il pouvait dans la team, soit à offrir du temps a ses Pokémon. Avec tout ce qui s’était passé… du temps à consacrer à ces Pokémon qu’il adore, il n’en avait pas eu beaucoup- et il faisait de son mieux à présent pour rattraper le temps perdu et renforcer leurs liens à nouveau.

Et parmi eux, il y avait ces Évoli. Ces adorables Évoli. L’un était assez agressif et l’autre timide de base- mais avec les moments qu’ils commencent à passer avec Artyom et ses autres Pokémon (surtout sa Poussacha bien sociable, bien sûr), la tension avait commencé à se calmer. Moins de méfiance ou de crainte, les deux avaient compris qu'ils étaient en sécurité et entre de bonnes mains- et au fur et à mesure, ils avaient commencé un peu à s’ouvrir plus. A être plus sociables, à apprendre à “jouer” avec les autres sans se méfier… De quoi se montrer vraiment gentils et adorables à la fin. Et de quoi rendre Artyom un peu mieux, lui qui avait besoin d’amour et de réconfort, en ce moment…

Oh, qu’il aimerait en demander à Ilya et Rin. Mais.. il sait, il sait que pour les deux, la période est compliquée, qu’ils sont occupés à des choses bien plus importantes- et avoir un militaire blessé qui demande de donner et recevoir de l’attention et de l’amour ? Artyom ne voulait pas les embêter plus qu’il ne l’avait déjà fait avant, il s’en voudrait. Même si passer du temps ensemble, à s’aimer, à passer des heures et des soirées ensemble… tout cela lui manque.

Jusqu’à une journée où il avait “trouvé” une façon d’aller voir l’un de ses deux compagnons, sous une excuse en espérant qu’il pourrait… peut-être passer un peu de temps ensemble, comme avant. Même juste entendre sa voix lui ferait du bien. Surtout qu’il arrive mieux à faire taire les émotions, et avec ça, Artyom pourra enfin pleinement profiter d’un moment ensemble sans avoir mal ou stresser… enfin, s’il peut déjà traîner un peu avec Ilya.

Tout ça lui traînait tellement dans la tête et parfois, il hésitait s’il devait vraiment le faire- mais quand il s’était retrouvé à vagabonder dans la base et à finir par se retrouver devant le bureau de son compagnon avec la Pokéball en main…

…

… Allez, il faut le faire. Sa main vient frapper à la porte de la même façon qu’habituellement- mais pourtant, c’était bien plus stressant qu’auparavant, peut-être parce que cela faisait un moment qu’il n’était pas allé le voir… ? Mais il en a besoin, rien que de l’entendre ou d’être proche de lui serait suffisant à ce stade.

- Monsieur, c’est Medvev. Puis-je avoir l’autorisation d’entrer ? J’aimerais vous parler de quelque chose.

Comme d’habitude, il parle comme un bon soldat quand il est “à l’extérieur” et que d’autres sbires pourraient le voir- mais cette façade tombera bien vite une fois dans le bureau et la porte fermée. En attendant, Artyom attend patiemment- bien qu’avec un peu d'appréhension, en espérant qu’Ilya ne lui en veut pas encore trop pour la dernière fois…

J’suis désolé

…

Le temps passe, et aucune réponse lui vient. Normalement, il aurait pris ça comme une absence ou quelque chose du genre- mais depuis qu’il a ce don, Artyom “sait” qu’Ilya est dans les alentours. Ses émotions, il ne peut pas les ignorer, même en faisant de son mieux. Cela lui pèse de plus en plus, mais… mais le militaire doit tenir, quoi qu’il en coûte.

Alors, il attend comme un Ponchien obéissant à la porte, en silence et espérant attendre une réponse, qui viendra sous la forme de la porte ouverte d’un coup et d’une main qui vient l’attraper et le tirer dans le bureau sans même avoir le temps de saluer proprement son compagnon, la porte se fermant aussitôt derrière à peine entré. L’homme se retourne aussi rapidement vers Ilya qui-... pleurait ?

Il avait bien senti que quelque chose n’allait pas depuis l’extérieur… mais Ilya qui pleure n’est pas quelque chose qu’on voit tout les jours, et le voir de ses propres yeux bleus pince le coeur du militaire, sentant déjà son côté “impassible” porté habituellement sur son visage déjà s’effacer pour montrer de l’inquiétude à son compagnon. Et… et en un clin d’oeil, Ilya était maintenant dans ses bras, tête contre son épaule à chercher du réconfort qu’Artyom offre aussitôt en le serrant dans son étreinte, posant sa propre tête à son tour contre l’épaule d’Ilya en silence.

Mais les mots qui s’échappent de ses lèvres… l’espace d’une seconde, le cœur de militaire s’arrête de battre sous le choc des paroles qu’on lui offre. Sa respiration se coupe, son corps devient tendu de bout en bout-

Il n’en pouvait plus, et voulait mourir de ses propres mains… ?

C’est au tour du militaire de sentir ses yeux piquer, alors que des larmes salées commencent à naître et à descendre sur ses joues- son étreinte devient plus forte et désespérée, tremblante même- même si c’était un ordre, ou quoi que ce soit, Artyom ne pouvait pas. Il ne pouvait tout simplement pas l’abattre comme ça.

Il l’aimait, Rin l’aimait- même si c’est égoïste et par pur amour, jamais il ne pourrait faire une telle chose ! Et Artyom voulait le lui dire, mais sa gorge s’était nouée en un instant et ses mots n’arrivent même pas à franchir ses lèvres.

Tout ce qu’il fait, c’est garder Ilya contre lui, avant de le pousser à se déplacer doucement vers un mur pour qu’ils glissent ensemble contre- pour qu’Artyom puisse ignorer un peu plus sa propre souffrance pour se concentrer sur son compagnon qu’il aime de tout son coeur et son âme, à qui il offre un baiser doux et tendre sur sa joue avant de le laisser se mettre bien contre lui, de laisser une de ses mains caresser les longs cheveux du blond avec le plus de douceur possible.

- Il ne faut pas… Il ne faut pas céder, Ilya. Je sais que les choses sont vraiment dures pour beaucoup, sûrement encore plus pour toi, mais… Tu ne dois pas laisser tomber. Beaucoup de gens ici tiennent à toi- je tiens à toi, et Rin aussi. On ne te laissera pas tomber, d’accord… ?

S’il te plaît. Pleure autant que tu veux, laisse tes émotions sortir- je te promets de garder tout ce qui se passe ici entre toi et moi. Fais tout ce que tu veux, ce que tu as besoin- mais s’il te plaît, de tout ce que tu peux dire… ne me demande pas ce genre de choses. Je ne le ferais pas.

Il ne pourrait jamais le tuer. Ce n’est pas ce qu’il peut faire… ni veut faire. Mais si Artyom peut l’aider à aller mieux, à le protéger… alors il fera tout pour. Son cadeau attendra encore un petit peu, juste le temps qu’Ilya puisse se calmer.