Bon et bien on peut dire que la nouvelle avait bien amusé Livre. Il avait ébouriffé les cheveux de son assistante en riant de bon cœur avant de venir raturer quelques feuilles de son écriture de médecin – cela pouvait aller, Cassandre savait déchiffrer ses codes. La jeune femme observait donc sans rien dire son supérieur lui écrire toutes les étapes du parcours qui l’attendait pour avoir en physique adapté au mental. C’était un peu stressant, pour ne pas mentir mais Cassandre prenait sur elle pour ne pas paniquer.

Livre était compréhensif, il avait rigolé de bon cœur mais ne se foutrait jamais de la gueule de Cassandre pour ça en particulier, ce serait hypocrite de sa part après tout. Surtout quand la légende disait qu’il avait pratiqué son hystérectomie tout seul comme un grand.

Le médecin finit par lui glisser la feuille sous les yeux pour lui montrer un véritable charabia médical auquel la jeune femme était habituée. Elle remit nerveusement quelques mèches de cheveux qui lui encombraient la vue en place avant de lire. Tout commencerait par des œstrogènes en patch apparemment, accompagné de comprimés de progestérone. Un petit mix « pour commencer » avait balancé Livre en se frottant les mains, ajoutant que ce traitement-là pouvait ne pas lui convenir mais que ce ne serait pas la fin du monde si c’était le cas.

Cassandre avait alors posé la question de l’opération d’une voix un peu timide.



Ouais bon, logique. Puis Cassandre n’était pas encore sûre d’elle-même mais une partie d’elle voulait griller les étapes. Même si la description de l’opération par Livre était peu ragoutante. Les médocs suffiraient, se dit-elle en soupirant.



Avait-elle soufflé en attrapant son ordonnance . Livre l’avait regardé de haut, comme si il était évident que cela allait marché et que cette phrase était absurde à prononcer. Mais bon, il finit par se relever de son bureau et tapoter l’épaule de son apprentie.



Dernier rappel sur tous les inconvénients de la transition, rendez-vous chez Nikita réguliers, arrêt de la clope, plus de bourrage de gueule, vivre comme une Matriarche au service d’Arkæ en somme. Mais Cassandre était prête à ce sacrifice. Elle regarda donc sans rien dire Livre poser les patchs et les médocs sur la table en le regardant d’un air complice.



La jeune femme hocha la tête en lançant un petit « merci » tout timide avant de sortir du bureau de Livre. Se dirigeant vers sa chambre pour y déposer son petit butin secret, elle fit face à nulle autre que Volodya lui-même. Elle le regarda d’un air éberlué avant de reculer bêtement. Entre les rubans dans ses cheveux et le fin maquillage qu’avait accepté de lui faire la collègue à qui elle avait « emprunté » sa trousse, la dernière fois, aucun moyen pour que le binoclard ne se doute pas de quelque chose.

Puis les médicaments qu’il portait dans ses bras, oh, Sainte Mère d’Arkæ…



Dit-elle d’une voix qui se voulait autoritaire mais qui transpirait plus le malaise qu’autre-chose. En plus, elle s’était entrainé à parler d’une voix bien clair et c’était sorti naturellement. Elle devait avoir l’air bien conne. Bon, Volodya aurait bien finit par revenir de chez son daron mais plus tard aurait été mieux, plus tard où elle aurait été sûre d’elle et prête à tout assumer. En clair, pas aujourd’hui.
         
         Halloween

Cassandre esquisse une petite grimace en entendant les quelques mots murmurés de Volodya. C’est con mais elle aurait presque peur qu’il se mette en rogne. Pourtant il n’a pas l’air fâché ? Difficile de dire de quoi il a l’air quand on est stressé comme ça, en fait. Alors la jeune femme se contente de continuer son chemin en baissant la tête, entrant dans sa chambre pour…

Et merde, elle avait totalement oublié les robes posées sur la chaise du bureau et la déco refaite sauce « féminine ». Bon, inspire, expire, calmes-toi Cassandre. Elle continue donc son petit trajet pour poser sur le bureau ses nouveaux médicaments. Et c’est toute gênée qu’elle revient sur ses pas, entortillant une mèche de cheveux autour de son doigt nerveusement. Elle n’ose pas regarder Volodya dans les yeux, enfin, même le regarder tout court en fait.



Finit-elle par admettre après un long silence. Elle doit vraiment faire une tête de Ponchiot battu car elle se sent triste de ne pas pouvoir s’exprimer, de ne pas pouvoir le dire, de devoir laisser le binoclard se démerder tout seul pour trouver ce qui a changé. Ça doit pas être compliqué pour lui, hein, mais reste que Cassandre aimerait bien avait le courage de le dire elle-même.

Mais rien ne veut sortir de sa bouche.



Bon, les couloirs de l’infirmerie sont pas surpeuplés et sa chambre est un endroit discret mais elle ne veut pas y inviter son crush. Pas encore. Alors elle se contente de s’éclaircir la gorge et de faire signe à Volodya de la suivre.

Il est encore tôt dans la matinée, la salle de repos ne contient pas grand monde – on peut même dire qu’elle est entièrement vide. Le seul gugusse qui y squattait est silencieusement invité à quitter les lieux par le regard noir que lui lance Cassandre. Pas besoin de le dire, le mec se lève et s’en va sans demander son reste, il faut dire que la meuf a une réputation maintenant qu’elle sait sabrer les gens à coup de machette.

Ils s’installent donc à table et Cassandre continue nerveusement le puzzle de paysage d’Alola laissé à l’abandon par le sbire fuyard. Après un grand silence, elle finit par bredouiller maladroitement.



Sa voix aurait presque quelque chose de malheureux, ce qui donne un effet assez pathétique avec sa bouille de Ponchiot battu sur le point de chialer…
         
         Halloween

Comme si la situation ne pouvait pas être plus gênante, voilà que Volodya lui fait des compliments. Tout y passe, le cœur qui s’accélère, les joues rouge Tamato et les Papillusion dans le ventre. Elle baisse le regard immédiatement, comme si il n’était pas assez bas comme ça, et ses mains viennent se joindre et se serrer au point d’en faire blanchir les articulations. Ses lèvres tremblent un instant puis elle lâche finalement un minuscule :



Et comme pour l’achever, voilà que le binoclard lui propose de lui apprendre à être plus féminine. C’est instinctif, elle secoue la tête, « non », c’est instinctif. Mais elle se rends bien compte que ce refus catégorique peut blesser Volodya, elle doit s’expliquer et c’est compliqué de le faire sans évoquer de raisons romantiques. Alors elle bredouille maladroitement.



Oh, qu’elle aimerait pouvoir faire ses premiers pas en tant que demoiselle avec Volodya mais… Mais en tant que sa petite-copine, pas en tant qu’amie. Elle sait que c’est con et que son amour n’est sans doute qu’à sens unique. Mais là maintenant tout de suite, elle meurt d’envie de lui faire sa déclaration. Pourtant, ça reste bloqué dans sa gorge.

Enfin, elle ne veut pas complètement décevoir le jeune homme alors elle se passe nerveusement une main dans les cheveux et lâche finalement.


         
         Halloween