tw : maladie mentale, secte, meurtre, prenez soin de vous les amis

La petite Sacha est née dans une famille fonctionnelle, c'est le mot. Ses parents étaient d'humbles travailleurs qui ne faisaient pas de vagues, mariés par convenance et non par amour. Mais ils ne se détestaient pas, au contraire, quiconque les voyait les disait complices. De ce couple est d'abord née Masha, puis deux ans plus tard sa sœur cadette : Sacha. Deux adorables petites filles, qui se sont vites liées comme les doigts d'une main. Probablement du fait de leur peur d'écart d'âge, elles se sont entendues sans trop de problème, malgré quelques chamailleries habituelles entre sœurs. Honnêtement, les premières années se sont déroulées sans réel soucis, comme juste une famille normale. Les petites recevaient tout l'amour dont elles avaient besoin.

Il y avait peut-être un seul point noir à cette paisible existence, qui a commencé à sérieusement se voir à mesure que Sacha grandissait : son anxiété. La petite était sujette au stress pour un rien, il fallait constamment la rassurer. Par exemple, son premier jour d'école fut une terrible catastrophe, impossible de la décoller de sa mère, et elle mordit sa pauvre professeure qui essayait juste de la prendre par la main. Malheureusement les parents ne pouvaient pas se permettre de faire les cours à la maison, ils devaient travailler. Donc on fit redoubler à Masha, pour qu'elle soit dans la même classe que sa sœur. Ainsi rassurée, Sacha put débuter une scolarité à peu près normale, au détriment de son aînée. Ça ne semblait pas déranger cette dernière, juste contente de passer du temps avec la plus jeune. Les parents ne firent rien d'autre que gérer ce stress lorsqu'il venait, pensant que ça se calmerait avec l'âge.

Encore jeune au moment de la chute du communisme, on ne peut pas dire que Sacha s'en souvienne particulièrement. Ce dont elle se souvient cependant, ce sont les disputes entre les adultes à ce moment. Pour quelle raison ? Elle n'a jamais su, sa mère ne lui en a jamais parlé. Mais ça a conduit à la séparation du couple pourtant si soudé d'ordinaire. Si son père fit tout pour obtenir la garde des petites, les deux furent confiées à la mère, avec des visites régulières chez leur géniteur. Rien qui n'aida au stress chez la gamine. En y repensant, c'est à cette période que les premiers signes ont commencé à se montrer, avec le début d'un isolement. Oh d'abord ça ne ressemblait à rien, juste une enfant désireuse d'avoir son espace.

Mais, de plus en plus, elle ne voulait plus voir ses amis, ni même sa sœur, ce qui inquiétait beaucoup cette dernière. Qui serait allé écouter les inquiétudes d'une petite d'une dizaine d'années ? Personne, et surtout pas leur mère, trop occupée à travailler pour ramener de l'argent au foyer. Elle voyait à peine le détachement de sa cadette. Pour une enfant, Sacha ne faisait pas grand-chose de ses journées, rien ne semblait l'intéresser. Les professeurs tentèrent eux aussi de se faire entendre, le père également, mais la mère restait sourde à tout. Sa fille n'avait pas de problème, c'était impossible à entendre pour elle. Du moins, ça l'était, jusqu'à ce que Sacha elle-même ne commence à se plaindre de choses... Bizarres.

Vers le début de son adolescence arrivèrent d'autres symptômes. Un jour, alors qu'elle faisait des courses avec sa mère et Masha, la petite s'arrêta d'un coup, les yeux grands ouverts. « Il pleut du sang sur le monsieur là-bas ». Une hallucination bien entendu, c'était la seule à la voir. Le monsieur en question était un homme d'un certain âge, parfaitement normal aux yeux du reste du monde. Pour une fois la mère s'est inquiétée, d'autant plus lorsque ça a recommencé, que sa fille voyait des choses qui n'existait pas. Le pire cependant ? Les voix. La petite disait entendre quelqu'un lui parler. Honnêtement, là, l'adulte se sentait dépassée, à son tour inquiète. Elle pensa d'abord à une possession spectrale, et alla voir le champion de Dusknograd pour ça, mais rien. Ce n'était pas ça.

Complètement incapable de comprendre, pensant sa fille possédée par une entité supérieure, elle se tourna vers la religion. Ça aurait été trop beau d'admettre qu'elle avait besoin d'aide médicale hein ?Par chance, le religieux sur lequel elle tomba écouta avec attention, et donna sa conclusion dans un calme olympien – teinté d'excitation.

« Madame, votre fille a été graciée par le Créateur. C'est Sa voix qu'elle entend, et les visions sont envoyées par Lui même. Je dois absolument la rencontrer. »

Sa propre fille ? Aussi importante ? Il n'en fallut pas plus pour qu'elle apporte Sacha à l'église, hélas, personne d'autre que ce religieux particulier n'accepta de l'écouter. La mère voulait qu'on présente la gamine à la grande matriarche, mais on lui dit d'arrêter ses bêtises, de ne pas les déranger pour ça. Sacha était touchée par la grâce d'Arkée, pourquoi refusaient-ils de l'accepter ? Une chance inespérée pour le religieux qui avait tiré cette conclusion : il rêvait de créer sa propre église, son propre culte. En réalité, Sacha arrivait juste au bon moment pour devenir la nouvelle prophétesse de ce qu'il comptait créer.

Avec un peu d'ingéniosité, la mère ne fut pas difficile à convaincre. Elle quitta tout, son boulot, sa vie, et emmena ses deux filles sous le bras pour suivre le religieux. Le père de leur nouvelle religion. Le petit groupe s'installa aux abords de Snoverkoutsk pour y être tranquille. Maintenant, il ne restait plus qu'à rassembler des fidèles. Heureusement le religieux était doué pour trouver des personnes à l'esprit faible, ou rejetées par la société, qui acceptèrent de le suivre. Sacha devint une véritable Déesse dans un corps humain, louée et vénérée par les fidèles de son culte. On écoutait avec attention ses paroles, et surtout ce qu'elle entendait. Franchement, la petite ne comprenait pas tout, surtout qu'on la détachait encore plus de l'affection de ses proches. Il ne fallait pas qu'elle soit souillée par des émotions humaines après tout.

Petit à petit, elle développa cet intime sentiment que les autres lui voulaient du mal. Une sorte de paranoïa, qui s'accentuait envers ceux qui tentaient de lui montrer de la gentillesse. Notamment sa sœur. Masha était forcément jalouse, Masha voulait la faire tomber. Elle parla de ses craintes au religieux, qui prit la menace au sérieux. Trop au sérieux.
Une cérémonie fut organisée. Une cérémonie au cours de laquelle Masha allait donner sa vie pour le bien de leur prophétesse. L'adolescente fut emmenée sur l'autel malgré ses cris et ses pleurs. Tout le monde croyait au bien-fondé de ce geste. Le pire ? Ce fut Sacha qui porta le coup final, cette lame plantée en plein cœur pour tuer sa sœur. C'était la bonne chose à faire, alors pourquoi ressent-elle un vide depuis ?

L'événement permit de mettre en lumière l'existence de cette secte, car des habitants de Snoverkoutsk trouvèrent le corps meurtri de Masha. Les autorités ne tardèrent pas à débarquer pour mettre un terme à ce qui se passait. La plupart des adultes furent arrêtés, la mère et le religieux carrément exécutés, mais que faire de la gamine ? Au vu de son jeune âge, on décida qu'elle n'était pas responsable des actions de sa mère, et puis, personne ne savait que c'était elle qui avait commis cet horrible meurtre. La pauvre avait simplement été entraînée par sa génitrice. Mais après plusieurs années dans cette secte, impossible de la faire revenir à une vie normale. Elle avait un retard scolaire énorme, ne pouvait de toute façon pas s'intégrer dans une classe.

Puisqu'elle semblait aimer les pokemons, il fut décidé qu'elle travaille à leurs côtés, en tant qu'apprentie éleveuse. Son père parvint à récupérer sa garde, après avoir montré patte blanche : ce n'était qu'un honnête travailleur soucieux du bien-être de sa fille. Il pleura d'ailleurs un long moment la mort de Masha, sous le regard impassible de Sacha. Bien entendu, celle-ci n'a pas été relâchée dans la nature, et est régulièrement surveillée par les rangers pour s'assurer qu'elle s'intègre comme il faut dans la société. Et, franchement, elle se plaît dans son travail qu'elle réalise parfaitement. De l'extérieur elle paraît une adolescente normale, calme et joviale, adorable quand on ne connaît pas son passé. Surtout qu'elle est mignonne physiquement : de petite taille, silhouette fine, avec de jolis yeux verts et des cheveux de même couleur à la coupe courte.

Sauf que tout le monde ignore pour les voix qu'elle entend toujours, qui lui disent chaque jour de se méfier du monde entier. En particulier de cet homme qui prétend être son père, et lui donne trop d'affection pour que ce soit sincère. Un jour, peut-être qu'il faudra lui offrir le même sort que Masha, une mort à Sa gloire. Mais pour l'instant, Sacha sourit, et ne laisse rien paraître de tout ce qu'elle voit et entend.