Plusieurs jours se sont écoulé depuis que Mishka s'est aventuré dans les catacombes sous ordre de Genya.
Il s'en est sorti avec d'horribles brûlures qui le forcent à porter des gants même en intérieur pour éviter les regards de travers, et un poignet cassé qui le force à se servir de sa main gauche. Comme s'il n'était pas assez maladroit comme ça... enfin. Les docteurs disent que c'est une fracture qui guérit bien et assez rapidement. Pour les brûlures... c'est une autre histoire.
Le plus frustrant ce n'est pas ces blessures, ni l'amnésie quasi totale qu'il a subi. Ce sont les cauchemars récurrents depuis l'incident. Comme si son subconscient essayait de se rappeler de quelque chose aux dépens de sa santé mentale. Volkov n'a pas voulu lui expliquer. Pas toute l'histoire. Il estime que cela doit rester privé, entre lui et ses ancêtres. Mishka sait bien qu'il n'obtiendra rien de ce vieux Bourrinos. Alors il fera ses recherches lui-même.
C'est à la bibliothèque de Dusknograd qu'il pense pouvoir trouver des réponses à ses questions. Il en est sûr et certain, ses cauchemars ne sont pas que des rêves sans queue ni tête. Les images sont fortes. Elles lui évoquent des émotions qui lui retournent la tête et l'estomac. Et surtout, il voit les mêmes, chaque nuit.
Un pieu noir d'obsidienne. Une lueur verte. La voix de sa mère.
Il est plongé dans des livres de mythologie depuis des erreurs et commence à piquer du nez. Entre cauchemars et insomnies, il manque cruellement de sommeil et ça n'aide pas son moral déjà bien au ras des pâquerettes. Il lit et re-lit la même ligne depuis vingt minutes maintenant. Il a l'impression de tourner en rond.
Peut-être que ce ne sont que des rêves, après tout...
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Forgetting pain is convenient, remembering it: agonizing.
Bon, à ce stade, il ne vient à la bibliothèque de Dusknograd que parce qu’il aime bien l’ambiance générale. Parce que sinon, niveaux livres, c’est niveau amateur, il vise bien plus haut. Alors voilà, il ne fait pas vraiment attention quand il pose sa pile de livres sur la table, ce qui fait sursauter le blondinet. Il s’attaque à décortiquer le texte qu’il a sous l’œil avec attention, à présent. Mais il ne peut cependant s’empêcher un coup d’œil sur le livre que lit son voisin de table.
Ah oui c’est vrai, il a un voisin de table, d’ailleurs…
Cringe.
Enfin bon, il se permets quand même un petit commentaire en l’air sur la lecture du petit blond. Surtout qu’il a l’air à moitié endormi, le pauvre…
« Si vous cherchez des informations sur les catacombes de Dusknograd, vous ne trouverez qu’un tas de bêtises à donner aux touristes dans ce livre. »
Ceci fait, il replonge dans l’étude de ses textes anciens, griffonne sur les pages de ses vieux livres à l’aide d’un crayon de papier et se concentre sur chaque phrase avec attention. Pour quelqu’un qui a du mal avec les métaphores, ce truc est une véritable épreuve à déchiffrer. Il n’arrive pas à s’en dépatouiller, aussi finit-il par prendre une pause, remarquant alors que le blond l’observe depuis un moment déjà. Il soupire et finit par souffler d’une voix agacée. « Que voulez-vous ? Des conseils sur de meilleurs ouvrages ? » Il farfouille dans sa pile de livres et en sort son propre livre pour le placer devant le blondinet, couvrant le livre idiot qu’il avait choisit de base. « "Histoires et Mythes des Catacombes de Dusknograd", j’avoue, ce n’est pas très original comme titre mais je n’avais rien d’autre en tête. Je n’ai pas la prétention d’être un expert, je ne suis pas un Volkov après tout. Mais disons que j’en sais plus que la plupart des gens qui se permettent d’écrire des bêtises sur ce lieu sacré. »
On pourrait croire qu’il se la pète mais pas du tout, il est totalement premier degré, vraiment énervé contre ces charlatans qui racontent n’importe quoi sur ce sanctuaire dédié à la mort. De plus, le manque d’enthousiasme de Dimitri face à ses dernières trouvailles lui laisse toujours une certaine amertume, ce qui le rends particulièrement grognon.
Il ne remarque même pas son nouveau voisin de table, perdu dans ses pensées - plutôt que dans sa lecture - comme il est. Si bien qu'il sursaute comme un Pachirisu sous caféine quand une pile de livres vient s'écraser à côté de lui. Il se réveille en sursaut, comme si la Tsareena Bomba venait d'exploser dans ses oreilles. La frayeur est vite dissipée, en revanche, en réalisant qu'il ne s'agit que d'un jeune homme, probablement dans sa tranche d'âge.
Ce dernier semble curieux. En tout cas, il ne peut pas s'empêcher de lire par dessus son épaule. Il se permet de critiquer sa lecture, et si Mishka avait été dans un bon jour, il aurait été conscient qu'il ne s'agissait que d'un bon conseil. Mais Mishka n'est pas dans un bon jour, et il est juste vexé et un peu outré que le binoclard vienne commenter son livre. On est dans une bibliothèque, merde, pas un salon de coiffure !
Ce n'est qu'en se répétant la phrase de l'inconnu qu'il finit par comprendre ce qu'il venait de lui dire. S'y connaitrait-il en catacombes ? Après tout, avec sa tête d'intello, il aurait pu les étudier, faire un mémoire dessus, ou peu importe ce que font les gens qui ne sont pas des élèves médiocres comme l'était Mishka. Et son regard interrogateur n'échappe pas au jeune homme - bien que ses lunettes partiellement teintées soient potentiellement un signe de cécité. Il finit par soupirer, exaspéré, faisant se recroqueviller le blondinet sur lui-même. Il ne voulait pas le mettre mal à l'aise, juste-
Avant qu'il ne puisse s'excuser, voilà qu'on lui jette un énorme livre sous les yeux. On dirait que le binoclard n'a pas su se retenir d'étaler son savoir. Et franchement ? Mishka ne va pas s'en plaindre. Dans son état, il n'aurait jamais probablement osé faire le premier pas.
Mikhaïl Isola... murmure-t-il en lisant le nom de l'auteur.
S'il a bien compris, il est en compagnie de celui-là même ? Pour être honnête, il ne se sent pas de lire. Ses yeux commencent à voir flou et il veut juste une bonne nuit de sommeil. Alors si Mikhaïl voulait bien lui rendre service...
Vous... vous voudriez bien répondre à quelques questions ? Je... si je lis un livre de plus, je crois que ma tête va exploser...
Il n'exagère presque pas.
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C’est un petit « Huhum » qu’il souffle quand le blondinet lit son nom sur la couverture du livre. Mais comme il s’y attendait aussi, il n’a pas l’air intéressé pour lire son ouvrage, pas que ça le vexe mais ça l’agace un peu de devoir répéter tout ce qu’il a écrit noir sur blanc. Bah… Soyons un peu indulgent, tout de même, le blondinet a vraiment l’air d’être exténué.
Un petit résumé, ça peut se faire, non ?
Alors Mikhaïl soupire, pas d’exaspération mais de réflexion. Il est pensif le gaillard, il se prépare déjà aux questions basiques qu’il peut recevoir mais… Mais maintenant qu’il y pense, le visage du blondinet lui est familier. Il le dévisage un instant avant de revenir fouiller dans ses affaires pour en sortir un dossier plein de paperasse et y extirper une photo. Il regarde celle-ci puis le blond, puis à nouveau celle-ci et…
« Mishka Beliaïev, ici ? » Souffle-t-il incrédule. « Que fait un garde des Fléaux aussi loin de son poste ? »
Bah oui, sur le coup, Mikhaïl n’a pas en tête l’histoire des deux champions et de leur mission suicide dans les catacombes. Et ce terme de « Garde des Fléaux » ? Oh, c’est un terme très vieux, bien avant que les régions étrangères ne viennent changer ça en titre de « champion ». Enfin, visiblement, Beliaïev ne connait pas ce vieux terme, vu qu’il reste muet comme un Magicarpe. Mikhaïl semble obligé de devoir préciser ses pensées.
« Vous êtes le champion de Sankt-Duraluburg, pas vrai ? Qu’est-ce qu’une personne comme vous peut bien vouloir savoir sur les catacombes ? Enfin… Peu importe, posez vos questions, je serais ravi de vous répondre. »
Il dit cela avec un sourire franc, vraiment heureux que son savoir puisse intéresser quelqu’un. Il croise d’ailleurs les bras et attends tranquillement que le blond formule ses demandes. Il s’imagine des choses bien classiques et il essaye déjà de formuler les réponses les plus complètes possibles.
Il n’est vraiment pas préparé pour la suite des événements…
Il esquisse une grimace s'apparentant à un sourire lorsque Mikhaïl le reconnait comme champion. Enfin "garde des Fléaux", comme il le dit. Il aimait l'idée de ne pas être reconnu. Parce que Genya n'aime pas que ses champions ne soient pas toujours sur leur trente-et-un à montrer la grandeur de Strana. Parce que le maître des dragons n'est pas censé faire des cauchemars comme un enfant. Mais bon... puisqu'il est "démasqué", rien ne sert de jouer la comédie.
Son identité semble au moins avoir piqué la curiosité du binoclard. Tant mieux, parce qu'il n'avait pas l'air particulièrement motivé à lui parler avant ça. Il lui rappelle un peu Alexandr, du genre taciturne et solitaire, mais qui devient une vraie boule d'énergie extravertie lorsqu'il parle de sciences.
Mishka inspire, hésite, expire. La mission qui lui a été donné... vient de la tsarine. Et Volkov lui-même n'a pas voulu reparler de ce qu'il s'était passé. En parler à un civil semble dangereux pour eux-deux. Il n'a pas envie d'être arrêté un beau matin par la police d'état, et se sentirait coupable qu'il en advienne de même pour Mikhaïl. Une semi-vérité ne fera pas de mal.
Eh bien... je fais énormément de cauchemars lucides ces derniers temps qui tournent autour des catacombes. Je sais que ça peut sonner stupide... ce sont juste des rêves mais... j'ai toujours été sensible à ces choses-là. Je vois toujours la même chose... une pièce obscure, un pieux noir pur, une lueur verte... les esprits se jouent de moi. Ils utilisent mes peurs et la voix de ma mère pour me manipuler. Je ne sais pas si vous croyez à ce genre de choses mais si ça vous évoque une légende... ou quelque chose... je serais soulagé, je pense.
Il espère presque, au fond de lui, que Mikaïl le prenne pour un fou ou lui assure que tout va bien. Que tout le monde fait ce genre cauchemars. Même s'il sait que tout était bien réel.
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Mikhaïl ne fait pas vraiment attention au malaise apparent de Mishka, peut-être parce qu’il prends ça pour de la fatigue ou bien parce qu’il ne le remarque vraiment pas. Toujours est-il qu’il écoute avec attention les paroles du blondinet, on pourrait même voir des étoiles dans son œil unique quand Mishka mentionne être « sensible à ça ».
Il se frotte les mains avant d’utiliser celle-ci pour fouiller une nouvelle fois sa pile de documents.
« Bien sûr, cela paraît logique. Vous êtes un Lanskoï après tout… Saviez-vous que votre famille a usé de ses dons pendant des siècles pour guider les Rusalka dans leur règne ? Bien sûr, la révolution n’était pas… Enfin, peu importe, revenons au sujet principal. »
Il sort cette fois un petit livre qui parait (très) vieux et (très) poussiéreux, la couverture parait être de cuir et les feuilles ressemblent à des parchemins. Mais c’est peut-être juste l’esprit de Mishka qui fait des conclusions tous seul sur ce livre tant il parait vieux et remplit d’enluminures. En tous cas, on dirait un recueil sur la vie d’un énième saint et cela, Mikhaïl ne tarde pas à le confirmer.
« Dima n’était pas vraiment intéressé par ce que je lui ai dis mais… Ah, je veux dire Volkov, c’est un ami de longue date. J’étais persuadé que ce que j’avais trouvé lui plairait mais… Enfin bon, le plus important c’est que ça intéresse quelqu’un j’imagine. »
Il feuillette le livre et reviens sur l’icône qu’il avait montré à son vieil ami, la mère tenant un petit squelette, et c’est au tour de Mishka d’apprécier sa nature macabre. Il y a vraiment quelque chose de « malsain » dans cette image, dans le regard attendri de cette femme sur la dépouille de son enfant. Oh, même si Mishka a apprit à associer tous rôle féminin négatif à Victoria, il ne peut le faire ici. Il imagine mal le championne de Stolista « se délecter » de la mort de ses enfants ainsi.
« Voici Sankta Dolorosa. J’ai de bonnes raisons de croire que vos rêves sont liés à cette sainte. » Il marque une pause et regarde bien autour de lui pour vérifier qu’aucune oreille indiscrète ne traine. Puis il reprends en chuchotant. « Vous voyez, cette information, je l’ai glané de façon… Un peu illégale, dans les archives d’état mais il se trouve que les catacombes ont été fondées autour de la tombe de cette Sainte et par pour n’importe quelle raison. »
Oui, Mikhaïl est totalement le genre de mec à partager ce genre d’info top-secrète avec un inconnu. Mais Mishka semble vraiment avoir besoin de son aide, non ? Bon, c’est surtout une bonne excuse pour parler de sa découverte à quelqu’un d’intéressé. Car il juge cela très intéressant. Il tourne les pages du vieux livre pour arriver à une autre illustration, cette fois, la Sainte est représentée chevauchant un étrange pokémon, une sorte de… « Tauros de roche » ? Avec d’immenses cornes en forme d’urne.
« Dinglu, le Fléau qui aurait fait surgir les monts Ursaluna de la terre. Le pokémon de la Sainte, scellé avec elle dans sa chambre mortuaire. Ou plutôt… En elle. Le concept est assez complexe, toujours est-il que Dinglu et Sankta Dolorosa ne sont qu’une seule et même entité. Les catacombes sont une protection contre quiconque voudrait « troubler le sommeil » de la Sainte. »
Il sourit, satisfait de son petit exposé… Avant de se souvenir qu’il est censé expliqué pourquoi c’est lié aux cauchemars de Mishka. Alors il se gratte la tête et essaye de mettre de l’ordre dans ses pensées pour être le plus clair possible car le champion a vraiment l’air crevé et que pour sa part, il n’aime pas répéter ce qu’il a déjà dit.
« Vous êtes clairvoyant, c’est dans votre sang, ce rêve que vous faites est lié à Sankta Dolorosa. Avec, cette pièce obscure qui serait sa chambre mortuaire, le pieux censé la sceller, le caractère maternelle de la manipulation des esprits et cette « lueur verte »… Du moins c’est ma théorie mais… Cela pourrait vouloir dire que quelque chose va se passer, que la Sainte pourrait être réveillée de son sommeil éternel… » Il se gratte le menton, pensif, avant d’ajouter pour lui-même. « Oh, ce serait un véritable désastre pour Strana… »
Avec tout ça, il en a oublié de mentionner pourquoi les signes du rêve de Mishka lui font penser à la Sainte du Fléau – pourtant censée ne pas avoir de nom. Il va peut-être falloir poser quelques question… Si Mishka n’est pas déjà complètement flippé par le caractère alarmiste des paroles de Mikhaïl.
C'est avec surprise que les yeux de Mishka s'écarquillent, au point où on le croirait presque bien réveillé. Il ne sait pas pourquoi, il a toujours ressenti que son "don" devrait rester un secret. Principalement parce que subir les regards dégoûtés de ceux qui le prennent pour un charlatan ou un fou le dissuadent. Mais aussi parce qu'il est sûrement le seul de sa famille à percevoir ce talent négativement. Il semblerait que Mikhaïl soit plutôt calé en histoire de Strana, ce qui explique son intérêt pour celles des catacombes.
Apprendre que le jeune homme est un ami de Volkov ne le rassure pas vraiment. Si Mishka fait un peu plus confiance au barbu depuis leur mission - il lui doit la vie après tout (et ça vaut bien un poignet cassé), il reste quelqu'un d'imposant, dont il n'a pas envie de se faire un ennemi. Si Mikhaïl lui rapporte leur discussion... bien que le blondinet omette volontairement que les évènements se sont réellement passé, il a peur que Dimitri lui en veuille d'avoir mis un civil dans la confidence.
Des angoisses qui paraissent tout de suite bien ridicule quand suit le reste de l'exposé du binoclard.
Sankta Dolorosa... Dinglu... le pieu et les voix dans sa tête... tout ça se mélange dans un bordel monstre sous son crâne. Qui se conclut par une simple phrase de la part de Mikhaïl, en toute innocence. "Un véritable désastre pour Strana".
Mishka se sent déjà transpirer. Lui qui s'inquiète déjà des petits soucis de tous les jours n'a pas besoin qu'on lui annonce la fin du monde. Ou du moins, une catastrophe à venir. D'une voix hésitante, il tente de marchander. Avec qui ? Il l'ignore.
Les Sankta... ils ne sont pas censés être des bienfaiteurs ? demande-t-il avec un regard presque suppliant, elle... elle s'est servie de-... enfin, dans mes rêves, elle se sert de moi pour... le pieu. C'est moi qui le sort du sol...
Il serre sa tête entre ses mains, à la fois parce que la fatigue lui donne la migraine, mais aussi parce que les souvenirs menacent d'exploser, et enfin... de la culpabilité. À l'idée qu'il soit le seul coupable de l'apocalypse annoncée. Par pitié... que Mikhaïl lui annonce que ça n'a aucune signification...
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Mikhaïl ne perçoit pas vraiment le malaise de Mishka, trop passionné par le sujet qu’il est en train d’aborder. Non, il trouve même la « question » du blondinet très intéressante et esquisse un sourire à l’idée de pouvoir préciser quelques détails en matière de théologie. Il s’éclaircit la gorge avant de répondre, donc, avec un enthousiasme certain.
« En vérité, Sankta Dolorosa, comme tous les Saints des Fléaux, n’a été sanctifiée que par crainte de son pouvoir plutôt que par adoration. Les Saints du Fléaux remplacent un peu le rôle d’antagoniste c’occupe Giratina dans l’Arkéisme Occidental. Ils ne sont… Enfin, ils n’étaient priés que pour éviter les déluges, famines et épidémies, avant l’ère communiste qui a balayé leur culte déjà ostracisé par la dynastie Rusalka. »
Puis la suite des paroles de Mishka vient lui percuter le cerveau de plein fouet. Le malaise du jeune champion lui apparait alors clairement, pourquoi n’a-t-il rien vu avant ? Les récits des spectres, leur agitation, la présence de Beliaïev ici, son état d’anxiété… Merde de merde…
« Ne me dites pas que… » Souffle-t-il faiblement avant de déglutir. « Ce… Ce n’est pas un rêve n’est-ce pas ? Vous et Volkov… Oh non, par Sankta Morena… »
Il baisse la tête, tout lui apparait clairement à présent. Il s’en veut soudain terriblement d’avoir confié autant d’informations au blond et regroupe ses affaires d’un geste nerveux, classant avec attention chaque document sans pouvoir s’empêcher de trembler.
« J’ai fais une erreur, une terrible erreur. Je n’aurais jamais dû vous confier tout cela… Si la Tsarine venait à… » Il marque une pause avant de baisser la tête. « …Elle sait. Bien sûr qu’elle sait, sinon, pourquoi aurait-elle… Par Arkæ, que cherche-t-elle à accomplir ? »
Il garde le silence un bon moment, observant le champion de Sankt-Duraluburg se morfondre du coin de l’œil. Il se mords les lèvres, essayant désespérément de trouver une réponse à cette question qui l’obsède. Il savait que Genya 1ière était une menace, d’une façon ou d’une autre. Mais de là à user de la puissance des Fléaux ? Elle jouait clairement avec le feu…
« Beliaïev, je déteste pointer du doigt l’évidence mais… La Tsarine s’est servi de vous comme d’un pion sur échiquier. »
Voyant que cela n’améliore pas la mine de son interlocuteur, il se dit qu’il doit bien ajouter quelque chose pour qu’il ne s’imagine pas être la source de tous les maux du monde.
« Si ça n’avait pas été vous, ça aurait été quelqu’un d’autre. »
C’est le mieux qu’il puisse faire, mais maintenant, il doit se calmer lui-même et se creuser la tête sur ce qu’il doit faire en tant que « serviteur » des Volkov. Il vient tout de même de livrer un sacré secret à une personne qu’il croyait non-impliquée dans l’histoire… Mais aucun spectre ne semble venir pour le réprimander… Est-ce qu’on essayerait de lui faire comprendre quelque chose ? Et si…
Il fixe Beliaïev d’un air pensif. Les champions restent les Gardes des Fléaux, après tout. Est-ce ce qu’attendent les Volkov ? Une mobilisation des champions contre une catastrophe imminente ? Il devrait parler de cette théorie à Dima, même si il n’a pas le courage de lui avouer le bourde qu’il vient de faire.
Il aurait aimé avoir mal compris cette histoire de Sankta Dolorosa. Mais apprendre qu'elle était plus redoutée qu'adulée est un tord-boyaux. Il n'y connait pas grand chose en religion... il a grandi à Keros, où l'on croit seulement en Arkée, a appris quelques rudiments de la religion Stranaïte via son parrain. Mais il a tout de même entendu parler des Fléaux. Et s'il ne se trompe pas, ils sont quatre.
Est-ce que Genya compte récupérer les reliques des trois autres ? Dans quel but ? Elle contrôle déjà l'une des régions les plus puissantes du monde... c'est sûrement une erreur. Oui, une erreur, et en constatant qu'elle a fait une bêtise - si un jour elle l'apprend - elle abandonnera cette quête folle.
Et dès lors que Mishka tente de se rassurer, Mikhaïl le fait redescendre sur Terre. C'est même en enfer qu'il le traine quand il voit clair à travers son jeu. Le champion essaie de mentir, il fait des signes de mains, jure qu'il n'a jamais été dans les catacombes, que Volkov n'a rien à voir dans cette histoire et que si le barbu est parti vivre des aventures dans ces tunnels morbides, il n'y est pour rien.
C'est peine perdue. Mikhaïl ne croira jamais ses mensonges, le blondinet n'a jamais été bon menteur.
S'il vous plait, souffle-t-il, complètement défait, ne dites pas à Volkov que j'ai... oh par Arkée, il va me tuer...
Enfin, si ce n'est pas lui, ça sera probablement les Fléaux, c'est ça ? Mikhaïl ne rigole plus du tout, il n'affiche plus son sourire fier en parlant de ses recherches. Il a l'air inquiet. Son aura a viré au glacial et retourne l'estomac du pauvre blondinet. Ce dernier manque de se rouler en boule et de se mettre à pleurnicher quand le binoclard lui assène la triste vérité. Genya s'est servie de lui, mais surtout... tout est de sa faute. Quand bien même Mikhaïl lui assure que ça aurait pu être n'importe qui.
Facile à dire, quand on n'est pas responsable de l'apocalypse, rit-il sans la moindre joie.
Sa migraine a empiré. Il n'a plus envie de dormir. Il a envie de mourir. Le sentiment de terreur pure qu'il ne connait que trop bien revient au galop, prend son corps en otage. Il devrait sûrement demander à Mikhaïl comment corriger son erreur. Comment lutter contre cette catastrophe imminente ? Est-ce qu'ils devraient prévenir les autres champions ? Mais non, actuellement, il veut juste creuser un trou et s'enterrer vivant.
Dites à "Dima" que je suis désolé... je... je pense que je devrais rentrer chez moi...
Sa voix le trahit, il est au bord des larmes. Mais merde, il ne veut pas pleurer en public, surtout pas devant un inconnu. Enfin... ledit inconnu est désormais en possession de secrets d'état. Alors est-ce que ça lui ferait quelque chose d'apprendre que le champion de Sankt-Duraluburg est une grosse tapette ? Probablement pas.
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Mikhaïl est un peu trop préoccupé avec ses pensées pour percevoir la culpabilité envahissante du champion de Sankt-Duraluburg, non, au lieu de ça… Il est pensif, premièrement, il cherche déjà une façon de s’excuser auprès des spectres pour une telle « bavure », ensuite, il cherche une raison à l’intérêt soudain de Genya 1ière pour les Fléaux alors que jusqu’à là, toute sa dynastie avait tout fait pour étouffer leur existence même.
La voix de Mishka parvient cependant à ses oreilles quand il demande à l’historien de garder tout ça pour lui et de ne pas en parler à Dima. Mikhaïl a un rire sans joie.
« Il nous tuera tous les deux si il apprends, rassurez-vous. »
Bon, d’accords, drôle de phrase mais l’idée est là, Mikhaïl et son interlocuteur sont dans la même merde. Mais alors que Mishka se lève, tout tremblant, pour rentrer chez lui comme il vient de l’annoncer, Mikhaïl lui saisit le bras sans pour autant le regarder. Quelque chose vient de lui venir à l’esprit et ce quelque chose ne lui plaît pas. Il doit en faire part au champion, on ne sait jamais.
« Il faudrait trouver un moyen de lutter contre Chongjian, à présent. Si elle cherche à tous les libérer, alors… »
Il daigne enfin lever la tête pour apercevoir le visage du blondinet pâle comme un linge. Il soupire et se lève, lui tapotant l’épaule avant de rassembler ses affaires et de les reprendre avec lui.
« Pardonnez-moi et mes élucubrations d’historien pleines de catastrophismes. Vous devez vous reposer avant tout, vous n’êtes pas en état de prendre l’Orient Express pour Sankt-Duraluburg. Il y a un petit hôtel, pas loin, rien de bien grandiose mais… Tout ce qui importe, c’est que vous puissiez vous reposer. »
Sans vraiment attendre de réponse, il commence son chemin, vérifiant bien par quelques coups d’œil que Mishka le suit. Ce qui est le cas, le champion semble trop résigné pour s’opposer à quoique ce soit. Mikhaïl réfléchit à quelque chose avant de souffler à l’attention de son interlocuteur quelques mots qui, il l’espère, allégeront sa conscience.
« Sankta Dolorosa avait besoin d’un fils sans mère, elle-même est une mère sans fils après tout. La Tsarine vous a manipulé car vous correspondiez au rôle et il est naturel pour un manipulateur de faire croire à sa victime qu’elle est la cause des crimes de son bourreau. » Il secoue la tête, pas vraiment certain de ce qu’il dit. Pas certain que ce soit clair ou que ça aide Beliaïev mais il ajoute tout de même. « Je vais demander à m’entretenir avec les spectres des catacombes, ils doivent bien avoir une idée du rôle que vous avez à jouer dans tout ça. »
Reste à espérer que Dimitri donne son aval pour un tel entretient. Mais Mikhaïl le juge plus que nécessaire, il a le sentiment profond que le blondinet – et peut-être tous ses collègues, même – aura un rôle à jouer à l’avenir. Il lui jette un dernier regard alors qu’ils sortent de la bibliothèque et qu’une bouffée d’air frais de fin d’Hiver vient revigorer ce petit monde.
Mishka est frêle et semble cruellement manquer de confiance en lui, pourtant, il a bien réussi à se hisser comme champion, non ? Il doit être plus fort qu’il ne se l’imagine, si seulement il pouvait s’en rendre compte… Ou si seulement il pouvait avoir un spectre avec lequel Mikhaïl pourrait communiquer plus aisément. Enfin, dans toutes ses pensées farfelues, une ne cesse de le questionner profondément.
Mishka serait-il prêt à s’opposer à la Tsarine pour le bien de Strana ?
Mikhaïl lui attrape le bras pour l'empêcher de s'en aller trop vite, et ce qu'il annonce à Mishka est sûrement la dernière chose qu'il aimerait entendre. Lutter contre Chongjian ? Est-ce qu'il a bien écouté son histoire ? Il a lamentablement échoué contre la dresseuse de Dinglu, et même si les astres étaient parfaitement alignés pour que les choses se passent telles quelles, il ne se fait pas confiance pour sauver le monde des Fléaux.
Mais l'historien semble réaliser qu'il n'a pas la tête à ça. Après tout, sa fatigue était apparente dès leur rencontre. Il a sûrement raison de lui dire qu'il ne tiendra pas jusqu'à Sankt-Duraluburg, et à quoi bon avoir un salaire de champion s'il ne peut pas se permettre une nuit ou deux à l'hôtel. Il se fera passer pour malade à l'arène un jour de plus, ça ne fera pas grande différence. Mishka suit le jeune homme sans résistance et sans un mot. Il a hâte de dormir. Hâte d'échapper à ses peurs et ses responsabilités - même s'il se doute qu'elles iront le poursuivre jusque dans ces cauchemars.
Mikhaïl cherche encore à le rassurer. Mais entendre dire qu'il n'a pas de mère est une réalité qu'il n'a pas envie d'entendre. Certes, elle est vivante et en bonne santé, mais à l'autre bout du monde, alors son cœur lui fait tout aussi mal. Il ne dit rien, cependant. Il sent qu'il ne cherche qu'à bien faire et à lui faire comprendre qu'il ne le tient pas responsable. Si Mishka avait l'énergie, il lui rétorquerait sûrement qu'il s'en fout, de ce qu'il pense, parce que lui se sent bel et bien coupable. Enfin... être défiant ne le mènerait nulle part. Alors quand vient l'heure de se séparer à la porte d' l'hôtel, il reste cordial.
Merci de votre aide, Mikhaïl. Mais... je crois que je vais devoir vous décevoir. Je ne suis clairement pas l'homme que vous cherchez pour combattre les Fléaux. Je suppose que c'est pour ça que nous sommes huit champions, songe-t-il avec un rire jaune, prévenez les autres si vous voulez. C'est déjà un miracle que je sois encore vivant.
C'est comme ça qu'il se sent. Un cadavre ambulant. Les médecins lui ont promis que la fatigue et la déprime partiraient d'elles-mêmes après quelques jours, que ce sont des symptômes communs après avoir été possédé par un Pokémon Spectre. Mais ils n'ont pas eu toute l'histoire. Se faire manipuler par l'esprit d'une Sankta malfaisante a sûrement des conséquences bien plus graves que de se faire piéger par un Skélénox espiègle. Dire qu'il pensait, quelques jours plutôt, que sa vie ne pourrait pas être pire...
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Mer 6 Mar 2024 - 2:02
I Forgor
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Accompagner Beliaïev vers un endroit descends pour se reposer fut étrangement facile, comme si les spectres étaient enclin à l’aider dans cette tâche. C’est comme si le chemin était tout tracé pour ne pas se perdre et tant mieux, parce que le pauvre blondinet avait l’air d’un zombie. Enfin, il a quand même l’énergie de lui échanger quelques mots avant leur séparation. Mikhaïl soupire et se gratte la tête, visiblement, il est tombé sur quelqu’un qui aime s’autoflageller sans réelle raison, c’est du moins comme ça qu’il le voit. Il est calé en Histoire, pas en Psychologie.
« Vous êtes bien plus que vous ne pouvez l’imaginer, Beliaïev. Vous êtes juste aveugle à votre propre potentiel. J’aimerais vous aider, vraiment. Tenez, prenez cela… » Il s’arrête un instant pour griffonner un papier avec ses coordonnées et le tends au blond. « Je sais qu’il y a peu de chance pour que cela arrive mais si vous avez le moindre cauchemars, le moindre doute ou quelque chose du genre, je… Je serais à votre écoute. J’imagine que c’est de mon devoir de « nouveau Volkov » que de procéder ainsi. »
Il esquisse un petit sourire et tapote l’épaule du jeune homme une dernière fois. Avec un peu de chance, le petit Couaneton deviendra grand Lakmécygne. Il lui faut simplement de l’aide, une aide que Mikhaïl n’est pas en mesure d’apporter, malheureusement. Mais il veut faire savoir à Mishka qu’il est là.
« Soyez sûr que les esprits des catacombes n’ont aucun ressentiment envers vous. La seule personne dont vous devez craindre le courroux, c’est vous-même. »
Bon, certains esprits étaient en colère contre Mishka. Mais c’était loin d’être la majorité. Quand à mettre au courant les autres champions, ce serait complexe. Puis Mikhaïl garde pour lui le fait que chaque champion est censé formé un duo avec l’autre champion de la même région. Pas sûr que Mishka veuille faire équipe avec sa cousine à la sinistre réputation, aux mains couvertes du sang de sa propre famille pour le bien de ses petits Hélionceau.
« J’espère pouvoir vous reparler une fois que vous aurez les idées clairs et l’esprit un peu plus apaisé. » Souffle-t-il finalement. « Puisse Sankta Morena vous prendre sous son aile et vous ramener sur le chemin dont vous semblez vous être écarté. Au revoir ! »
Il se retourne et commence à marcher dans la rue, l’air froid du soir le fait frissonner légèrement. C’est qu’il aurait besoin de repos aussi, avec tout ce trop-plein d’émotions. Il ira consulter les spectres, ça c’est sûr. Mais il ne dira pas non à un bon beau chaud après tout ça.
Pour le reste… La nuit porte conseil, comme on dit.
Ven 1 Mar 2024 - 0:16
