Aujourd’hui, Mikhaïl a été invité par… Une amie ? Boarf, une vague connaissance, une secrétaire de son éditeur pour être exact. Il ne comprends pas trop pourquoi elle l’a invité ce soir au restaurant mais bon, il ne dit jamais non à un peu de bouffe gratuite. Même si franchement, il aurait préféré aller au O’Donalds prendre quelque chose à emporter pour manger dans un endroit plus calme.
Sa collègue, une blondinette à la taille fine, s’est… Comment dire ça poliment ? Tartiné un pot de peinture sur la gueule ? En tout cas, elle n’a pas fait dans la dentelle avec le maquillage et sa tenue… Il ne l’avait jamais vu avec une jupe aussi courte av ant, il pensait qu’elle était plus pudique. Ce n’est pas un problème, il ne juge pas, mais il trouve que ça ne colle pas avec la personnalité habituelle de la demoiselle. Alors pendant que… C’est quoi son nom, déjà ? Ah ! Maria ! Pendant que Maria raconte sa vie, il regarde son assiette de faux-filet de Tauros, pensif.
Merde, il aurait peut-être dû lui dire qu’il était végétarien – le thé de Morgante ne compte pas - avant de la laisser commander pour eux deux parce qu’il ne savait pas quoi prendre. Parce que ce n’est pas cette petite salade d’accompagnement qui va lui remplir l’estomac pour la soirée. Et il n’ose pas lui dire maintenant, ce serait malpoli… Et en plus elle est en train de parler, il a dissocié tout du long donc il ne sait pas de quoi elle parle, mais elle parle. Quelque chose en lien avec une certaine Natasha qui ferait chier au travail. Mikhaïl ne sait pas en quoi ça le regarde mais il se contente de hocher la tête, penaud.
Puis après un long moment à blablater, elle s’arrête et regarde son invité d’un air concerné.
« Misha ? Quelque chose ne va pas ? Tu n’as pas touché à ton assiette… »
Misha ? On a pas élevé les Gruikui ensemble ! Enfin, c’est ce que pense le binoclard mais il n’en dit rien et se contente de faire « non, non » de la tête. Enfin, faudrait quand même qu’il lui dise qu’il ne touchera pas sa nourriture – et accessoirement qu’il se fait chier comme un Rattata mort. Donc au bout d’un petit moment, il demande d’une voix hésitante :
« Désolé, Mademoiselle Maria, mais… Pour quelle raison m’avez-vous invité exactement ? »Cela doit être drôle car ladite Demoiselle éclate de rire avant de regarder Mikhaïl avec des yeux doux, le genre de regard qu’on lance à un abruti qu’on aime bien. Mais l’abruti en question reste de marbre et cligne de son œil valide, complètement paumé. C’est pas son anniversaire – il sait même pas quelle date c’est de toute façon. Alors qu’est-ce que ça peut être… ? Bon, d’après le calendrier des Saints, c’est le jour de Sankta Siwa, Sainte Dresseuse de Créfollet et Sainte patronne de la beauté, de l’amour et des relations charnelles mais… Maria ne connait pas trop la religion alors ça peut pas être ça, si ?
Bon, autant clarifier au cas où…
« Je ne suis pas sexuellement intéressé par vous, Mademoiselle. Navré. »
Le regard de travers que lui lance Maria aurait dû lui indiquer qu’il était sur la mauvaise pente mais il continue dans sa connerie d’une voix on-ne-peut-plus sérieuse. Il veut être clair et net sur la question.
« N’espérez pas de moi une quelconque interaction de ce registre. Je suis dédié corps et âme à mon métier et… J’avoue avoir l’impression de perdre mon temps, surtout si vous vous imaginez des choses de ce genre. » Silence gênant puis il ajoute timidement
« …En plus, je suis végétarien. » Maria soupire et se lève d’un geste sec. Ce qui surprends un peu Mikhaïl mais il ne dit rien, il la regarde juste d’un air interrogateur. C’est une réponse sec et vexée qu’il reçoit à sa question muette.
« Et bien puisque je n’intéresse pas Monsieur, je m’en vais ! Bonne soirée, Mikhaïl, à vous et à vos livres ! »
Un moment de silence et Mikhaïl hoche la tête avec un petit sourire.
« Merci, Mademoiselle. Je ferais de mon mieux pour profiter de mon temps libre, vous aurez mon prochain manuscrit dans peu de temps ! »Aucune once de second degré dans sa voix, ce qui déstabilise la jeune femme un instant avant qu’elle ne soupire lourdement et s’en aille, l’air dédaigneux. Mikhaïl n’a rien comprit du tout mais il a retenu une chose. C’est lui qui va devoir payer le repas, du coup, et ça le fait un peu chier. Boarf, il imagine qu’il pourras demander de l’aide à son (seul) ami si besoin, Dima est gentil, il ne refusera pas. Enfin, Mikhaïl l’espère.
Parce que c’est un putain de restau étoilé…
Solo Saint Valentin